mercredi 30 avril 2008

Coup de Coeur

Quelques uns attendent depuis longtemps, d'autres nous connaissent depuis peu. 5 aspirants au postulat vont frapper à la porte du couvent. Nous avons reçu leurs courriers, nous avons commencé une correspondance avec certains, parfois même on a été se prendre une bière pour pouvoir discuter plus avant!
Je ne sais ce que le conseil des Soeurs décidera, quels seront ceux qui nous rejoindrons pour continuer l'aventure.
Ce que je sais, ce que j'ai vu ou lu, c'est le désir, l'envie, la joie d'essayer de s'engager, de trouver un moyen pour échanger, partager, servir, aimer plus et surtout différemment.
Ils ont la vingtaine, la trentaine, la quarantaine, sont en couple ou célibataire, gay, bi ou hétéro.
Ils parlent souvent d'un coup de coeur, réfléchi ou spontané, mûri ou impulsif, ils cherchent a expliquer ce qui les attire vers notre couvent, notre ordre, nos combats.
Alors oui, ça va pas être facile, oui, nous ne sommes pas nombreuses et pas question de brader la formation et les exigences pour faire du nombre. Au contraire, notre AGO à décider de renforcer les exigences concrètes dans la formation des postulants et des novices.
Oui, tous ne seront peut être pas Soeur de la Perpétuelle Indulgence.
Mais le coup de coeur, le coup au coeur, c'est nous, les vieilles et les nouvelles, qui l'avons quand notre engagement voit venir à sa rencontre le désir éveillé d'autres Folles.
Eux et elles aussi l'épidémie les rend dingue, la honte, la solitude ou le manque d'amour vécus par beaucoup leur donne envie de chausser des talons, de se mettre une jupe sur le cul et un peu (beaucoup lol) de maquillage sur la figure pour aller offrir les trésors de Joie et d'Amour que plusieurs générations de frangines ont accumulés.
Alors à Stéph., à A., à L et Ben., à M et S, quoique décide le conseil des Soeurs, quoique soit votre chemin dans ou avec l'Ordre:
Merci pour vos coups de Coeur en réponse aux nôtres!

samedi 19 avril 2008

Se laisser toucher

En le regardant, je savais que les derniers temps avaient été difficiles.
Presque une année que nous nous croisons: " Alors ma soeur, comment allez vous?" On discute, on parle un peu, un lien se crée, éphémère, délicat, dérisoire tout comme nos personnages.
Et puis cette nuit là, il est tout seul près du Dance Floor. Je ne m'attendais pas à le trouver dans cette boite de nuit.
Alors on parle un peu, on discute et puis...
:"Ma soeur, vous m'offrez un slow ?"
Il vous laisse le choix et vous savez que vont s'échanger les quelques mots qui vont faire une légère mais profonde différence.
Savoir se laisser toucher par ce p'tit gars malade, par son histoire, son quotidien. Accepter de partager ce moment et ouvrir son coeur en même temps que ses bras. Etre fier du chemin qui nous a mené tous les deux à cet instant précis.
Alors nous avons dansé et autour de nous personne n'a rien vu. Un beau garçon qui danse avec une Soeur de la Perpétuelle Indulgence quoi de plus normal. Le merveilleux est resté caché dans mon coeur, dans ses yeux.
P'tit gars, si tu savais ce que tu as offert à la soeur à qui tu ouvrais ton coeur. Sur ce slow, j'ai retrouvé le sens de mes voeux, l'envie d'aider ceux et celles qui veulent s'engager sur notre chemin de nonnes folles et radicales pour qu'à leur désir d'être soeur répondent de tels instants.
Les prides, la semaine de la Fierté Ours, le festival de Soullac, les Solidays et toutes nos soirées improvisées sur le trottoir, nos soeurs qui seront bientôt en ressourcement... une vie et le travail d'une soeur, ce qui fait notre joie, notre fierté, notre espoir aussi.
Le reste ne m'intéresse plus, nous saurons nous en protéger les unes les autres.
Pensez à nous samedi prochain: notre AG sera une jolie garden partie en campagne!

jeudi 3 avril 2008

Reconstruire

Comme un bateau qui sort de la tempête, doucement, chacune de mes soeurs commencent à prendre conscience que le temps a changé.
Reposer ses nerfs, ne plus attendre le prochain éclair, décrisper ses doigts du pont où chacune avait pris place pour faire face aux vagues; oui, décidément, le temps à changé.
L'une de mes soeurs, une ancienne d'un autre couvent, m'a dit aujourd'hui.
"faites attention les unes aux autres, vous sortez d'un sacré coup de vent, il va vous falloir du temps pour vous reconstruire"
Je sais qu'elle a raison.
Il va falloir faire le bilan des pertes de confiance, des relations mal en point, des colères ravalées sous la bourrasque mais que le beau temps aura tôt fait de laisser éclore.
Le problème ne se pose pas entre celles qui ont affronté l'orage. Etre sur un même bateau pendant un tel grain ça crée des liens forts entre celles et ceux qui ont choisi de rester.
Non, le vrai problème c'est pour reconstruire!
Ce bateau n'est pas le nôtre, l'équipage est au service d'un truc qui dépasse l'installation d'un nouveau club d'anciens combattants. Parceque de tempêtes en tempêtes on ne verra que la multiplication de ces clubs; celui de la bataille de 96, celui de la grande guerre du Sida, celui de la mutinerie de 2003.
Si nous reconstruisons sur nos colères, nos rancunes, nos confiances mises à mal alors les prochains à s'engager sur le navire navigueront avec nos colères, nos rancunes et nos manques de confiance. Le plus important pour eux ça sera les tempêtes et pas notre voyage!
Alors que faire ?
Peut être se laisser le temps de prendre conscience que le temps à changé! faire les réparations d'urgence et reprendre goût à naviguer. Puis, calmement, voir monter à bord de nouveaux mousses et aménager avec eux un bateau qui sera aussi le leur.
Mon papa, en m'apprenant les rudiments de la voile, disait que si on avait construit les bateaux pour la tempête alors, on n'aurait sans doute jamais fait la moindre barque.
Se souvenir qu'une soeur est là pour offrir de la joie afin de lutter contre la honte, contre la maladie, contre tout ce qui fait l'humanité moins belle et le quotidien vide de magie!
et après seulement...
Inscrire sur son livre de bord:
"avons traversé une sacrée tempête, l'aventure continue..."

mardi 25 mars 2008

Samedi Saint..."l'aube revient encore"

Avant d'être la belle journée qui a vu l'élévation d'une nouvelle novice, une belle manif pour le droit des tapins et aussi le jour anniversaire de notre Ordre; c'était pour moi le samedi de ma semaine Sainte.
J'ai gardé bien peu des rites qui ont marqué ma vie d'avant.
En fait, je n'ai gardé que la pratique de l'office de Complies, celui de l'office des Morts, le carême et la semaine Sainte. Dans cette semaine un moment m'est particulièrement cher: l'office de l'agonie du Christ et le vendredi Saint.
Mon portable est éteint, la porte de ma chambre reste close.
Cette année mon esprit et mon coeur furent habités par des méditations qui n'étaient pas si éloignées qu'il y paraît.
La première était l'Absence. Sûrement parce que c'est le thème du recueil que je suis en train d'achever, peut être aussi en raison des choix qu'il m'aura fallut faire cette année.
La seconde fut le Combat. Je me suis souvenu des combats qui furent miens, du serment d'allégeance des soeurs où je me suis engager à nouveau pour un autre combat, celui qui s'est enfin achevé dans notre petit couvent.
Au combat, on ne gagne jamais que de nouveaux absents. Des absents qui vous hantent, des absents qui vous libèrent, certains qu'on pleure, d'autres qu'on regrette. On gagne aussi, quand on les gagne, des énergies nouvelles dans le coeur, les yeux, les mains, de ceux qu'on découvre à ses côtés.
Surtout, ne pas se perdre soi-même. C'est la seule façon pour qu'un combat ne devienne pas une guerre.
La dernière de mes méditations fut sur l'Espoir. L'enjeu de la nuit au Mont des Oliviers m'a toujours semblé être la vie ou la mort de l'Espoir sur soi, sur l'autre, pour soi et pour l'autre.

Certains trouveront certainement malsain de prendre autant de temps pour réfléchir et prier sur le récit de l'agonie puis du supplice d'un pauvre type en Palestine il y a plus de 2000 ans.
J'y ai trouvé une paix profonde, une joie nouvelle, pour continuer a écrire ma vie de garçon, ma vie de soeur, mon choix d'être un Homme.

A l'instant où j'écris, du Tibet à la Birmanie, de l'Afrique à l'Amérique Latine, en fait partout dans le monde, tant d'hommes et de femmes se battent, entourés de tant d'absents, avec l'Espoir de la Liberté, de la Justice, de se trouver eux-mêmes pour que le Monde en soit meilleur!

Si on ne peut faire mieux, du moins, on ne doit pas faire moins.

vendredi 21 mars 2008

C'est quoi un couvent ?

Une drôle d'alchimie, un pot au feu de bonnes volontés, une bouillabaisse un peu lourde à digérer parfois mais riche, si riche qu'on a une seule envie: la partager!
Enfin ça, c'est dans le meilleur des cas.
Par ce que votre couvent est aussi l'histoire glorieuse des faits d'arme de vos ainées et l'histoire beaucoup moins sympathique de leurs coups de pute. Il se compose des p'tites déceptions de vos soeurs et de leurs grands espoirs, de votre p'tite pierre et de vos gros cailloux. Comme la grande Dame en noir le chantait de son amour, je pourrais dire de mon couvent...
qu'il s'alanguit, qu'il rêve, qu'il frissonne, qu'il tangue, qu'il chavire et comme la rengaine, il va, il vient, il tourne et que de temps en temps il se traîne...
Demain, notre couvent élèvera une nouvelle novice. Cette futur novice est mon ami et mon colocataire. Comment lui expliquer ce qu'est un couvent, ce qu'est notre couvent, avant qu'il mette son premier talon dans ce magnifique guêpier ?
Bien sûr depuis le temps qu'il nous connait, depuis les longs mois de son postulat, je crois qu'il en a vu tellement...
Mais a-t-il la passion qui fait rester, l'amour qui donne envie de se battre et de poser des choix pour ses soeurs ?
Il le découvrira et nous le découvrirons avec lui.
C'est peut être ça l'essentiel d'un couvent, ce petit supplément qui fait que nous sommes aussi soeurs ensembles: une aventure individuelle vécue, crée, partagée collectivement.
Demain notre couvent comptera un nouveau personnage, notre ordre comptera une nouvelle novice. Des soeurs des deux couvents parisiens recevront ses voeux, feront mémoire à travers lui des voeux que chacune à prononcer et que toutes, nous essayons de vivre.
_Amour _Joie et Paix _Droit à la différence _Solidarité _Lutte et prévention VIH sida _Droit et Devoir de Mémoire
Alors, finalement qu'est ce qu'un couvent ? le nom d'une association loi 1901, la propriété d'une personne, l'histoire d'un groupe, l'envie d'être ensemble, un club exclusif de vielles copines, une idée qui tient chaud quand on a plus que ça, la chance de n'être pas trop seul...
Demain, en même temps que son costume, son nom et son voile, les soeurs du couvent de Paname offriront à cette nouvelle novice un outil.
Nous lui dirons attention, cet outil est fragile et il est notre bien à toutes. Comme disait St Augustin : "une partie de nous le compose et c sur lui, dans son ensemble, que chacun se repose."
Finalement, je lui glisserai peut être à l'oreille:
"Aime
et fait que voudras...
Notre couvent est fait pour ça"

dimanche 3 février 2008

Vivre dans l'Histoire

Il y a peu, nous étions dans une asso de jeunes gays et lesbiennes. Deux soeurs, un postulant pour raconter, présenter, partager l'histoire des soeurs et notre vie de soeur de la Perpétuelle Indulgence.
Presque un exercice de style où nous avons vu maintes fois nos ainées s'illustrer avec brio. Surtout ne pas oublier les dates, étaient-elles trois ou quatre à la première action... bref comment redire sans trahir ou rabacher ?
Je crois que nous nous en sommes bien sorties mais le plus étonnant pour moi reste ce sentiment étrange; faire parti de l'Histoire!
Si souvent j'ai l'impression de subir, de voir s'agiter l'Histoire et d'en garder juste l'écume, d'en avoir le sel sur le visage sans jamais avoir pu me jeter dans les vagues.
Il y eut de grandes manifs et oui, j'y étais. Quelques mouvements artistiques, politiques ou spirituels et là aussi, je fus du lot.
Mais, cette fois-çi en parlant de la communauté gay, de ses tribulations durant la seconde moitiée siècle précédent, de cette saloperie de Sida, des Soeurs, du bonheur et des déceptions rencontrés en trainant mes talons sur les trottoirs et les dancefloor; notre histoire était la mienne, mon aventure rencontrait celle de beaucoup d'autres.
Instant étrange où tout est en harmonie mais aussi en mouvement.
Certains se vantent de ne pas changer, de n'avoir jamais varier et cela m'a toujours fait rire intérieurement. Un peu comme les notaires de Brel dans sa chanson sur les Bourgeois, ils sont ravis de se regarder passant les années, satisfaits. Comme Brel je trouve cela touchant, comique et un peu pathétique aussi.
J'espère que j'ai changer et que je continuerais à évoluer, à tenter l'Histoire!
Se détourner de l'histoire est un peu ce que me semble faire beaucoup dans notre pays. Inquiets pour leurs histoires individuelles (leur travail, leur famille) ils laissent à d'autres le soin de faire l'Histoire. Ce n'est jamais très bon signe pour les libertés collectives et individuelles.
Mais, depuis ce beau sentiment à la sortie d'une action sans rien d'extraordinaire, j'essaie, un peu plus, de savourer et de comprendre, de conserver et de tendre vers...
Bref, de vivre mon histoire avec et dans l'Histoire.
Sur la Carte du Temps que Nos Chemins soient de Lumière

jeudi 24 janvier 2008

L'histoire d'une Soeur ?

En débutant la rédaction de ce post (et de ce blog) je me demandais qui allait parler et de quoi... Car cette Soeur de la Perpétuelle Indulgence est aussi un citoyen, un "militant" queer, un garçon qui aime des garçons et parfois, aussi, des filles.
"Au début d'une histoire il y tout ce que l'on dit, tout ce que l'on voudrait dire et aussi tout ce qu'il faut savoir taire " disaient nos anciennes.
Je voulais offrir un peu de cette magie dont le manque pousse des gamins à se jeter sous des métros pour ne pas voir arriver le jour suivant. Je voulais partager toute la poésie, tout le courage et tout l'amour qu'on se réfuse mais qui suintent dans les regards certains soirs. Je voulais offrir un visage de faux cils et de paillettes à tout ce qui me dégoute et me fait serrer les poings
Lutter avec Amour et Humour.
Depuis le Juillet 2006 me voila entré dans l'Ordre des Soeurs de la Perpétuelle Indulgence; un truc de dingues pour mes amis, une folie de plus pour ma famille.
En un peu plus d'un an et demi je suis devenu Soeur de la Perpétuelle Indulgence, mon colocataire est entrée dans l'Ordre, mes amis (chacun à leur manière) se sont mis à partager cette aventure, ma famille regarde notre combat avec un respect et une fierté dont les points d'interrogations sont devenus, peu à peu, des mots que nous partageons ensembles.
Et le garçon sous le maquillage a changé lui aussi.
J'ai vaincu des peurs, j'en ai découvert de nouvelles. Mes rapports au milieu gay et queer ont évolué.
Ce blog ne sera pas une suite de résumés édifiants de ce que les Soeurs font à Paris et ailleurs dans le monde. Les sites internet de chaque couvent le font très bien.
Je crois que ce sera juste le journal, pas si intime que ça, d'un garçon de 27 ans embarqué volontaire dans une aventure qui le dépasse.
Si j'avais su qu'aimer les garçons, la liberté, la justice, la beauté pouvait mener à la vie que j'ai actuellement... alors je n'aurais pas aimer moins ni différement, j'aurais peut-être simplement eu moins peur de souffrir.
"Tachons d'être Heureux"!